Je vous ai dit que j’avais HORREUR de l’avion ?
Non ?
Ben, c’est fait.
Je déteste les avions.
J’exècre les avions.
J’abomine les avions.
Les avions sont une insulte à la face de Dieu
(Je sais, venant de quelqu’un qui adore les vaisseaux spatiaux, ça semble un peu contradictoire mais je m’insurge : dans l’Enterprise, y’a pas de trous d’air, ou alors ça se saurait.)
Je ne monte dans un avion que sous la menace d’une arme ou si l’autre terme de l’alternative, c’est 5000 km à la nage.
Si j’avais pu, j’aurais pris le train même s’il avait fallu passer par Vladivostok pour aller à Montréal.
Pourquoi ?
D’abord, un avion ça vibre, eh oui dans certaines circonstances, je hais les vibrations. Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis.
Ensuite rien de plus social qu’un avion, votre voisin dort pratiquement sur vos genoux, et je vomis jusqu’au concept de voisinage. personne n’est moins social que moi, même quand je pétule et que je charme comme dirait quelqu’un qui a déjà payé ça…
Ensuite, c’est super long, c’est non fumeur, et – surtout – y’a des bébés dedans.
(Je fais une allergie aux bébés, constitutive, néonatale, qui ne m’a passé que deux ans en suivant lorsque j’ai eu les miens – un artifice de la nature pour m’obliger à me reproduire. Bon, objectivement il m’arrive, mais pas toujours, de bien aimer – de loin – les bébés des copines. Mais il faut qu’ils soient beaux, sympathiques et souriants ou totalement amorphes, genre coussins, là ça va.)
(Mais je vous rappelle que je ne suis pas une femme respectable.)
Dans les avions, les bébés ne sont ni beaux, ni sympathiques, ni souriants, ni amorphes. Ils sont FURIBARDS !!
(et j’avoue que c’est l’un des rares instants de notre existence conjointe où nous nous rejoignons sur un truc, les bébés et moi.)
Bref, ils gueulent, tout ce qu’ils savent, sur la tonalité exacte étudiée pour vriller les nerfs des adultes, pendant des heures.
Et du coup, je passe les sept heures incompressibles à hésiter entre la terreur ou la haine, sentiments égalements fatigants sur le long terme.
le hurlement vrilleur est encore un truc de la nature qui sert à éviter qu’on IGNORE les bébés.
Lorsqu’on a le choix entre le meurtre et le biberon, je suppose qu’on se résigne statistiquement plus facilement au biberon.
Quoique, moi…
Bref.
Il arrive toujours un moment en vol où je ne sais plus qui je déteste plus : le bébé à deux rangées derrière moi, ou l’avion autour de nous.
N’empêche, j’ai eu du bol à l’aller comme au retour, même si les bébés me cernaient, j’étais accompagnée. Par Tom Clegg et sa compagne vers Montréal, puis par Eric Picholle et Anouk vers Paris. J’avais donc des phalanges voisines à broyer en cas d’attaque de panique, cela seul suffit à me rasséréner quelque peu en général, je n’ai même plus besoin de passer à l’acte. Ce qui fait que mes quatre voisins successifs ne sont pas rentrés manchots chez eux.
Cela dit, au retour, tandis que je malaxais l’accoudoir avant le décollage, Eric s’est penché vers moi et m’a dit :
— Ça t’aiderait si je te faisais un cours d’aérodynamique qui t’expliquerait pourquoi l’avion vole ?
Ce garçon est adorable mais c’est un E.T. Ou le petit frère de Sheldon.
Ce n’est pas le fait que l’avion vole qui me colle des angoisses. J’ai fait du deltaplane, je SAIS jusque dans mes os que le plus lourd que l’air, ça fonctionne. Je SAIS que les lois de la physique sont incontournables, même pour moi, même par faveur spéciale.
(Mes seins et la gravité universelle me le rappellent tous les jours).
Cela dit, je sais aussi comment avec un simple deltaplane, juste quelques empans de toile, des tubes et des mousquetons, déjà tout est susceptible de foirer.
Et si je suis athée comme une meute de coyotes, j’ai un petit coin de gnose planqué quelque part entièrement dédié à :
MURPHY.
Murphy est le seul dieu que je respecte. Il possède un temple de marbre vert virtuel sous mon crâne et sa statue, consciencieusement ornée d’orchidées bleues géantes importées d’Alpha du Centaure tous les matins, ressemble au fils bâtard de Pierre Pevel et de Louis Jouvet, avec Léonard Nimoy en guest star.
Et Murphy lui, il adore les avions.
Murphy ne peut rien contre la physique, c’est déjà ça.
Mais contre l’électronique alors là, pardon, scusez-moi !
J’ai un PC !
(Et je sais m’en servir)
On me la fait pas !
Dans l’électronique, MURPHY s’éclate, en permanence, tous les jours, et à plusieurs millions d’exemplaires.
Et les avions sont BOURRES d’électronique.
Et de PC.
On devrait jamais quitter Montauban.
Surtout avec un PC.
Je me sens particulièrement raisonnable là, non ?